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ASSOCIATION DE DIDACTIQUE
DU FRANÇAIS LANGUE ÉTRANGÈRE
en partenariat avec la Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord


Démarches FLE :
Quelles nouvelles utilités ?


Démarches FLE – français langue étrangère : quelles nouvelles ‘utilités’ ?

Bilan et perspectives (séminaire ASDIFLE du 27 juin 2007 à la Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord)

La journée du 27 juin 2007

Le FLE, français langue étrangère, a été progressivement développé puis reconnu en tant que tel depuis les années soixante. A partir de 1983, ont été créées des filières universitaires diplômantes (bac + 4) de formation de spécialistes en FLE ainsi que des certifications pour non locuteurs natifs (le DELF et le DALF, diplômes élémentaires et approfondis de langue française), le tout avec un succès non démenti à ce jour. Pourtant, sur bien des points, il y a eu évolution : les publics, les situations, les formations, les méthodes, les praticiens, les chercheurs, les métiers, etc. Pour engager une réflexion et se donner les moyens de mieux repérer ce qui se joue actuellement, l’association de didactique du français langue étrangère, a organisé le 27 juin 2007 à la MSH-Paris-nord un séminaire exploratoire. Il s’agissait de poser à nouveau la question des ‘utilités’ des démarches FLE, avec leur didactique contextualisée et leur univers de référence international, tout en rappelant et en (re)mettant en pratiques ces mêmes démarches dans toute leur amplitude : former aux usages d’une langue, oui, mais lesquels, avec quels publics dans et pour quelles situations, quelles interventions, avec quelles formations initiales et continues, le tout dans le contexte actuel de mondialisation et les nouvelles donnes locales.


Les participants

Une quarantaine de participants venus de tous horizons géographiques et professionnels, aussi bien des formateurs, des professeurs, des gens de médias, que des étudiants et des enseignants-chercheurs, se sont réunis pour reprendre ensemble la tradition des premiers séminaires de l’ASDIFLE, qui se sont tenus à partir de 1986 autour du Professeur Louis Porcher, fondateur, et de personnalités comme Pierre Bourdieu ou Antoine Prost. Leur point commun était d’être tous engagés en didactique du FLE (et du FLES, français langue étrangère et seconde), du point de vue du terrain ou de la théorisation, dans l’empan large qui va des métiers aux  élaborations conceptuelles sur les compétences, les cultures et les apprentissages : autrement dit, ils se posent tous des questions et sont animés par la curiosité, car les publics, les situations, les terrains, les dispositifs de formation, les libertés et les contraintes sociales et géopolitiques évoluent.

La didactique d’une langue étrangère, en particulier le français, se trouve forcément au contact d’au moins deux langues et deux cultures, elle doit donc construire ses références et ses questions pour inventer sans relâche des réponses aux défis du terrain, avec l’aide des apports issus des recherches en sciences du langage, de la communication, de l’éducation, en particulier dans le domaine des apprentissages, et avec les compétences relationnelles, d’observation et d’adaptation dont il faut faire preuve sur le terrain.

Toute démarche FLE, à condition qu’elle ne soit ni partielle ni partiale, est une prise de connaissance contextuelle à visée didactique (pour la classe de français, mais aussi pour concevoir des programmes, des manuels, des politiques linguistiques et éducatives).

Les démarches FLE sont forcément plurielles car elles se développent sur un fond de plurilinguisme avec une amplitude transnationale et culturelle. Elles se caractérisent par un triple ancrage, ethnographique, historique et de culture(s), et bien sûr didactique (ou intra-didactique), mais ce dernier ne peut se développer sans les deux autres, puisqu’il est question de français langue non maternelle, donc de contacts de langues et de cultures.

  • Le niveau ethnographique est celui du terrain, des contacts, de l’observation des échanges, du récit de choses vues et vécues ; il s’agit de focaliser sur les pratiques langagières et communicatives de tel ou tel groupe avant toute décision (si décision il doit y avoir) ;

  • Le niveau historique et de culture(s) est celui de la mise en contexte, institutionnel, géopolitique, économique et historique, donc de l’analyse, de la lecture et de la réflexion ; il s’agit de prendre en compte les conditions de production des pratiques et aussi des représentations ;

  • Le niveau (intra)-didactique est celui de la langue et des usages de la langue à apprendre et enseigner, et de ses acteurs ; pourquoi sont-ils là, plus ou moins engagés dans des activités organisées d’écrit, d’oral, de lecture, de phonétique… seuls ou avec d’autres ? Et comment faire au mieux ?


  • Trois ateliers et leurs résultats

    Il s’agissait de focaliser la réflexion sur trois thèmes :

  • le français dans les milieux sociaux,

  • le français à l’école et à l’université,

  • le français hors de France.

  • Dans chacun des trois ateliers, on a recensé les situations liées à l’usage du français pour locuteurs non natifs, les publics visés dans leur diversité, les manques et les difficultés de terrain, la formation des formateurs et les aspects plus strictement didactiques et relationnels.

    Détaillons les acquis...


    Atelier A

    Le français dans les milieux sociaux

    Publics, situations, dispositifs

    Il est apparu que les nouveaux publics sont un défi à ce qu’on croyait savoir sur l’immigration, les étrangers en France. Ce sont souvent des gens en situation d’échec social et qui ont des difficultés économiques (dans le cas contraire, ils apprennent le français par leurs propres moyens). Pourtant, ils sont intégrés à leur façon, dans des logiques parfois subtiles mais efficaces, car s’intégrer, c’est vivre.

    Ces nouveaux publics sont les vagues actuelles d’immigration, venues d’Europe orientale, des Balkans, de l’Asie, avec des cultures que la France connaît (et reconnaît) mal. L’immigration est aujourd’hui plus complexe (pas seulement le travail), les personnes sont souvent en transit, et les conflits planétaires impriment leurs marques sur les parcours et les personnes.

    L’hétérogénéité est devenue la règle, et non plus l’exception : dans un même cours on peut avoir une personne qui n’est jamais allée à l’école et un bac + 5, avec des âges très différents. En outre, le lien établi désormais entre cours de français et droits sociaux fait que les motivations et les enjeux ont changé : on s’inscrit, on vient un peu pour avoir la carte d’inscription… et on disparaît. En outre, la multiplicité (et parfois la superposition) des acteurs rend illisible la carte des formations et la liste des « formés » : entre les mairies, les centres sociaux, les associations, les humanitaires,… il est parfois difficile de démêler qui fait quoi, et donc de bien suivre les parcours d’apprenants (on a vu des débutants durables, pendant 6-8 ans ! Quel enthousiasme peut bien donner le fait de ne jamais progresser ?)

    Les cours de français souffrent donc de non-assiduité, et il est plus difficile qu’avant de créer des liens durables propices à un apprentissage. Par ailleurs, la complexité des dispositifs, qu’ils soient d’insertion, d’aide, de contrôle ou d’enseignement de la langue, mène souvent au découragement et au repli sur soi.

    D’où un fort investissement demandé aux enseignants, aux concepteurs et organisateurs - pas forcément tous qualifiés, il faut le noter – ce qui ajoute à la difficulté des interventions.

    Mais depuis trente-quarante ans, les métiers se sont-ils stabilisés ?

    Ce n’est pas le cas : le milieu des formateurs de FLES est toujours en voie de professionnalisation, sans formation continue, plus d’une génération après son apparition ; il n’y a pas d’identification précises des compétences, alors qu’elles sont nombreuses, variées et transversales à différents domaines et disciplines.

    Cela empêche sans doute la reconnaissance effective dans le secteur privé (conventions collectives) comme dans le secteur public (un spécialiste de FLE et de didactique est ou linguiste ou professeur de langue, mais il n’est guère reconnu comme tel… sauf par ses pairs).

    Les enseignants, leurs compétences, leurs savoirs

    Pourtant les compétences peuvent et doivent être listées, en relation avec les interventions dans lesquelles elles se déploient, en voici quelques-unes :

  • le savoir observer, pour... entrer en communication, se positionner de façon juste, de façon à pouvoir apprendre et enseigner à être locuteur et auditeur en français ; et cela commence par les regards, les gestes marquant ou non l’inscription dans tel ou tel groupe ;

  • le savoir créer la confiance... pour bien travailler ;

  • le savoir intervenir à bon escient (ni trop, ni trop peu, ni trop tôt, ni trop tard), pour... poser le statut des participants et le sien propre (si on est enseignant), et poser aussi ce qui est enseigné ;

  • le savoir créer l’échange à partir des impalpables du vécu et du senti (mimiques, gestes, etc.), pour… engager le groupe dans l’apprentissage ;

  • le savoir gérer son image, pour... apprendre à rassurer, ou dynamiser au bon moment ; savoir imposer le respect, parfois ;

  • le savoir jusqu’où déstabiliser de façon productive pour... amener tel ou tel apprenant à progresser s’il le veut, ou à se mettre en cohérence avec lui-même.

  • Et cela suppose de...

  • savoir analyser son ou ses publics ;

  • savoir choisir des documents, des situations, des supports de formation adéquats ;

  • savoir adapter des progressions, et concevoir des formations sur mesure ;

  • la capacité à supporter le doute, voire l’inconnu ;

  • la capacité de décentration par rapport à autrui (par ex. se mettre à la place d’un illettré, imaginer sa vision du monde) ;

  • La capacité à accepter (au moins temporairement) une pluralité de valeurs et de modèles, tout en gardant son autonomie ;

  • la capacité à évoluer, à progresser, à se remettre en cause, à se former en continu.

  • Mais on peut se demander si ces compétences seront les mêmes et exercées avec la même amplitude en d’autres contextes : par exemple, si on est un professionnel en FLE hors de France, si on représente la France dans un service culturel, un institut français ; la décentration, alors, ne doit-elle pas s’accompagner d’une vive conscience d’être français ? Il semble que, là comme ailleurs, tout soit question de tact et mesure, et que représenter la France hors de ses frontières ne dispense pas d’expérimenter ces subtilités…

    De même, on peut lister les savoirs nécessaires, et toujours à réactualiser, faut-il le préciser :

  • savoirs concernant les dispositifs institutionnels (éducation, travail, migrations, Europe, universités, droit, etc.) ;

  • savoirs culturels sur la société d’accueil et sur les sociétés ou groupes d’origine ;

  • savoirs et actualisation des savoirs en description de la langue à enseigner pour pouvoir mieux en expliquer le fonctionnement et les usages.

  • Spécificité des interventions didactiques en FLE

    (et d’ailleurs aussi en alphabétisation)

    Elles sont tout à fait spécifiques (cf. ci-dessus, démarches FLE) parce qu’il faut sans relâche élaborer leur contexte présent, ainsi que l’appropriation des lieux, du temps, et sans relâche aussi faire en sorte que le contact entre langues et cultures, ce miracle humain, puisse se renouveler. Citons quelques particularités mises en évidence outre la construction du contexte... :

  • la réflexion sur l’acte graphique, du geste au rapport au langage, y compris ses variantes selon les alphabets ;

  • la réflexion sur la communication, les échanges dans leurs aspects verbaux, para-verbaux et non-verbaux, non seulement en Europe, mais dans des cultures variées ;

  • l’analyse des représentations et la conscience simultanée de leur caractère utilitaire, contingent (car elles coexistent) et essentiel (pour la sécurité de vie des gens) ;

  • la nécessité de se positionner dans la concurrence des langues et des cultures (par exemple : ce qui se dit à la mosquée / ce qui se dit en classe de français) ;

  • la nécessité de construire des ressources pour la vie quotidienne, qu’elles soient d’ordre matériel ou symbolique.

  • On voit par là combien le professionnel en FLE en France est à la fois multi-compétent et sous-estimé : s’il fait tout cela sans être reconnu, s’il n’a et ne demande aucun droit à la formation continue (car il n’identifie pas ses besoins de formation, il s’auto-forme en continu et sans reconnaissance), n’est-ce pas qu’il le veut bien ? Et, comme le disait un collègue à une institutrice qui avait choisi de travailler avec les enfants non francophones nouvellement arrivés en France « Mais quelle c… as-tu faite pour te retrouver avec de tels élèves ? ». Comme si la diversité culturelle et les variations dans l’enseignement du français, loin d’être un « plus », étaient un poids !

    Incroyable ? Mais vrai. Cela nous permet d’en venir aux acquis de l’atelier B, sur le système scolaire et universitaire.


    Atelier B

    Le français dans le système scolaire et universitaire

    Constats d’ensemble : l’Ecole et au-delà

    Une première remarque est que le système scolaire et universitaire repose sur des implicites, des évidences culturelles, qui, tues, sont dispensées de remise en cause. On peut discuter sur ces aspects de divers points de vue ; si on s’en tient au point de vue didactique, force est de constater que, parmi les implicites, il y a tout ce qui permet au système de fonctionner et à l’élève de s’intégrer avec bonheur :

  • la lecture et la compréhension des consignes des activités de classe (et des activités du soir) ;

  • les modèles relationnels en vigueur pour entrer en contact avec les enseignants ;

  • les modèles de production orale et écrite selon les disciplines ;

  • les objets mis à disposition dans la culture scolaire française (que de richesses, pour certains élèves !) ;

  • les façons d’apprendre et d’enseigner ;

  • ce qu’on fait quand on se tait ;

  • ce que c’est que réfléchir ;

  • ce que c’est que résoudre un problème,

  • etc.

  • Ensuite,  on note l’importance du savoir prendre la parole, et aussi la céder, la partager : cela ne s’acquiert pas d’emblée ou miraculeusement, mais par des essais et des erreurs, avec la valorisation de ce qui est réussi.

    La même importance est dévolue au rapport à l’écrit : est-ce que ça va de soi d’écrire, de dire « je », ou de décrire, d’expliquer, d’argumenter – en bref, de jouer le jeu scolaire ? Il faut donc impérativement en donner les règles et les faire reformuler, exemplifier, illustrer, jouer… jusqu’à ce qu’elles aient été entendues.

    Enfin, l’atelier remarque que le statut du savoir est très important et qu’il peut varier selon les latitudes, les cultures et les représentations.

    Bilan 

    Apprendre à parler le français, c’est aussi réapprendre à parler en français, se retrouver soi avec ses mots, mêmes et autres ; et les relier aux mots aux dires du départ et des origines.

    En clair, le FLE est indispensable, car il sert de variable d’ajustement au système qui, sans lui, serait obligé de se réformer plus en profondeur.

    Au niveau primaire, et collège, sans doute le FLEsco* (français langue étrangère ou seconde scolaire) donne un cadre pour penser l’intégration des non francophones ; sans doute aussi les innovations pédagogiques venues du FLE permettent-elles d’irriguer des remédiations pour élèves en difficulté voire en détresse, non sans les avoir décolorées de leur « fâcheuse » identité, que ce soit pour l’école élémentaire, le collège ou les lycées professionnels.

    Le FLE est indispensable également car il est transversal aux disciplines. Mais le français partout ne crée pas sa légitimité, bien au contraire : l’institution Ecole ne prend pas en compte cet apport (cf. les discours sur le FLEsco, qui serait si proche du FLM... mais alors pourquoi ne s’en être pas avisé plus tôt ?) ; elle l’utilise, mais elle ne dessine pas sa place, elle la superpose à l’existant et la structure ne bouge pas. Comme dans les milieux sociaux en France, les professionnels en milieu scolaire sont peu ou non reconnus.

    * A noter : l’appellation FLS, français langue seconde (pour l’école en France ou la vie socio-administrative hors de France), se voit mal placée au niveau international car pour certains pays et dans certaines langues, la langue seconde, c’est la langue étrangère...

    Qu’en est-il du côté des universités ?
    Les enseignants

    Outre que le FLE a suscité et développé toutes les innovations didactiques et bien des configurations nouvelles en recherche durant ces dernières années, il représente l’avenir tant en termes de professionnalisation que de recherches et réflexions structurées sur la co-construction et la transmission des savoirs au plan supra-national ; mais encore faudrait-il que l’ensemble des universités et des décideurs le reconnaissent ouvertement, au lieu de s’esquiver sur des défenses corporatistes. Si on regarde la carte des formations et des enseignants spécialisés en didactique du FLE (c’est-à-dire ayant à leur actif des publications et des recherches en ce domaine), on voit une nette régression au profit d’autres spécialités jugées plus nobles (car sans trace de professionnalisation possible ?) depuis dix ans au moins. En d’autres termes, la génération qui a créé le domaine, loin d’être remplacée, voit ses postes et libellés d’enseignements confisqués ou détournés. Il n’y aurait pas d’étudiants, ce ne serait pas si grave – une querelle professionnelle – mais il se trouve que, sans étudiants, point d’universités.

    Les étudiants et leur formation

    Il y a d’abord les locuteurs de français langue non première qui viennent étudier en France grâce aux programmes d’échanges, en particulier européens. Pour eux, les utilités du français langue étrangère sont...

  • de culture française et universitaire : comprendre comment fonctionne l’université, les relations avec les enseignants, les cours, les examens (écrits, oraux), pour pouvoir tirer profit de leur séjour et réussir leur année ;

  • de culture disciplinaire, en droit, gestion, lettres, philosophie, sciences, médecines, avec les usages, les formes du discours, la lecture, etc. ;

  • de vie quotidienne : comment s’orienter, se débrouiller dans la vie de tous les gens, comment rencontrer des gens, etc.

  • d’accès à la professionnalité : comment faire un CV, trouver un stage, voire un emploi, passer un concours, etc.

  • Et il y a les étudiants inscrits dans les cursus menant au professorat : dans certaines formations en IUFM, on voit apparaître des enseignements de didactique du FLE, en plus du FLM, mais de façon encore insuffisante.

    Enfin, les filières FLE créées en 1983 (mention FLE de licences Lettres, Langues et Sciences du langage, Maîtrise FLE) ont perduré et sont devenues des masters ; ou plus exactement, elles se sont intégrées dans de grands masters de Lettres ou de Langues. Cela génère plusieurs difficultés :

  • carte des formations universitaires peu lisibles depuis l’étranger, et même pour un étudiant français en recherche d’une spécialité ;

  • risque de formations incomplètes car faites de parcours non coordonnés, avec à la clé des compétences et des savoirs fragiles.

  • Il en résulte des insertions très différenciées et avec des succès inégaux – parfois à la mesure de la qualité des étudiants concernés : professeur de FLE c’est d’abord professeur de français avec un « plus » et non un « moins » et certains étudiants en font la brillante démonstration, mais pas tous. C’est que, pour le système des emplois publics, il faut avoir passé un concours (CAPES, professorat des écoles, agrégation…) pour pouvoir être retenu sur un poste à profil ; ainsi, la Certification complémentaire en FLS, délivrée par les rectorats, est-elle accessible seulement aux personnes déjà titulaires. Et pour les emplois dans le secteur privé, la situation a été abordée ci-dessus (atelier A).

    Alors, faut-il partir hors de France ? C’est l’espoir de certains…


    Atelier C

    Le français hors de France

    On peut d’abord distinguer des publics et des situations :

    - les étudiants, pour des études universitaires qui sont…

    ... tantôt en expansion, avec des publics parfois non traditionnels et des contraintes décalées (demandes de français en vue de filières professionnalisantes ; demandes de filières traditionnelles, lettres, droit…, mais pour des étudiants aux parcours d’enseignement secondaire très hétérogènes ; demandes de français des spécialités ; demande d’appropriation de l’écrit et des oraux universitaires) ; il est à noter que le développement des formations ouvertes et à distance permet à des étudiants étrangers résidant hors de France de suivre des études et de passer un diplôme français, mais la distance culturelle jointe à l’hétérogénéité des niveaux et des savoirs fait que les réussites sont inégales (ici, on citera le cas des étudiants chinois, désormais présents dans toutes le filières… y compris à distance) ; il importe donc de repenser les modes d’enseignement (ils devraient en particulier décliner beaucoup plus les implicites du système, des et de la discipline, car au plan mondial, rien ne va sans dire, et aussi rappeler les références, les bases des savoirs dispensés) ainsi que les modes d’accompagnement et de tutorat ;

    ... et tantôt en récession actuelle (systèmes d’enseignement ayant évacué le français, cf. le Liban, où beaucoup d’arabophones voudraient apprendre le français et le peuvent de moins en moins) ou à terme (mauvaise lisibilité des intitulés de master, trop généraux, et que les étrangers ont du mal à décrypter).

    On peut dire que le français sur objectifs universitaires est une réalité aussi hors de France, avec les CEF, destinés à préparer les études en France et en français, dont un exemple existe depuis plusieurs années en Chine. Les opérateurs comme CampusFrance oeuvrent avec les Alliances françaises, les Instituts et le secteur non institutionnel.

    - Les professionnels ont des demandes de formation aux métiers, pour des niveaux divers (de l’ingénieur au technicien et aux salariés du service client) et des compétences parfois très limitées voire limites comme dans le cas des centres d’appels délocalisés (demander, expliquer, éviter le conflit ; mais aussi estomper les traces d’un accent en français afin que les lieux d’appel ne soient pas identifiés) ; les secteurs concernés sont surtout l’hôtellerie-restauration, le tourisme, les compagnies aériennes, la grande distribution.

    Cela pose le problème de comment enseigner quand on n’enseigne à communiquer que partiellement (ne doit-on pas quand même installer une compétence générale ? Et prendre en compte l’apprenant dans sa globalité humaine ?), ce qui correspond d’ailleurs à l’étendue des libertés laissées au professionnel visé, mais le laisse démuni face à un apprentissage complexe, qui ne peut pas être dit communicatif et à peine co-actionnel, car il ne s’agit à l’oral « que » de pouvoir formuler des argumentaires et des réponses selon des scripts précis, et à l’écrit de savoir rédiger des prescriptions… et dès que l’échange en français sort du champ de ce qui a été appris, les apprenants sont perdus ; alors, ce qui fait la différence, c’est le niveau de formation initiale de l’apprenant dans son pays.

    - Il y a enfin toute une série de cas intermédiaires liés aux migrations, avec des demandes d’apprentissage du français en vue de rejoindre certains pays francophones comme le Québec, pour y résider, y travailler ou y faire des études ; ou le français langue véhiculaire (cf. le cas des travailleurs chinois en Afrique) ; se pose alors le problème de la prise en compte des variations car dans un pays francophone donné, il y a souvent plus d’une norme (voir le cas d’Abidjan avec l’argot, le français ivoirien, et le français plutôt scolaire). En tout cas le français est facteur d’intégration car l’anglais ne va pas de soi partout…et il ne faudrait pas oublier les publics en « désir de France et de français », langue et culture, mode d’expression de soi ludique et authentique.

    On constate en outre que la langue française en milieu universitaire et professionnel hors de France joue le rôle de discriminant dans les embauches et dans les progressions professionnelles. Des cas sont cités : la pâtisserie, la mode et les Beaux Arts en Corée ; le français du vin en Argentine, et aussi en Chine ; un peu partout, le tourisme, la restauration.

    Autour du français, se retrouvent des intervenants variés :


    Bilan

    Les acquis didactiques des trente dernières années sont parfois mis à mal par des demandes partielles ou hétérogènes, dont la cohérence n’est pas immédiatement apparente. Les démarches FLE sont donc loin d’être démodées : il faut, encore et encore, revenir aux terrains, les observer, les comprendre en utilisant les outils théoriques à notre disposition (n’oublions pas que « théorie » vient du grec theorein θεωρείν, « observer ») de façon à pouvoir penser puis mettre en place des réponses didactiques adaptées aux situations actuelles et aux esquisses émergentes ici et là.

    Alors faut-il jouer l’uniformisation pour simplifier les choses et dans un but d’efficacité ou de moindre coût ? ou développer une attention renouvelée aux situations et des publics ? Et peut-on imaginer une ethnographie des études et du travail en contexte(s) mondialisé(s) ? Ou faut-il laisser faire le grand marché éditorial et des formations ? Le problème se poste déjà au niveau européen, avec la « tension entre standardisation et contextualisation » (Daniel Coste, conférence du 19 juin 2007, CIEP).


    Rendez-vous pour les prochains séminaires de 2007-2008 qui prolongeront ces thèmes. http://asdifle.org http://www.mshparisnord.org


    Dernière mise à jour : 28/07/07

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