La lettre de l'ASDIFLE
  Numéro 4 - Janvier 2007

Après-demain, c’est aujourd’hui même
par Louis Porcher

Par les temps qui courent, quiconque chercherait à échapper à la sinistrose multiple qui colore toutes les appréciations sociales publiques, et dont chacun vise à prendre une tangente individuelle en protestant haut et fort de son parfait désintéressement, serait amené à envisager avec un optimisme roboratif l’avenir du monde et en particulier celui des cultures et des langues, comme le fait par exemple Louis-Jean Calvet pour ce qui touche aux langues, qu’il traite comme des espèces zoologiques, appelées à vivre ou à mourir et qu’il est totalement vain, à terme, de vouloir protéger par des triples murailles ou des cordons électroniques.

Que voit-on, en effet, se dessiner ? François Héran, directeur de l’INED (Institut national d’études démographiques), qui, à ce titre, ausculte les nervures de l’avenir, c’est-à-dire regarde au-delà d’aujourd’hui et même de demain, nous annonce l’amplification de ce qu’il appelle joliment « le brassage des populations » et donc des relations croissantes entre les cultures mondiales (présentes dans le monde quelles que soient leur nature, leur ampleur, leur « légitimité »).

En France par exemple, dit-il, le nombre des mariages mixtes augmente vertigineusement, et, donc, la fabrique d’identités plurielles. Contrairement à ce que proclame le battage des médias sur l’accroissement de la fécondité des Françaises (les plus prolifiques d’Europe pour l’instant), la courbe démographique est amenée à s’affaisser dans vingt ou trente ans, et, par conséquent, les mouvements migratoires sont appelés à s’accroître et à s’accentuer.

Quel meilleur signe, pour notre domaine, que ce développement des métissages et des interrelations ? Mais qui, parmi les didacticiens de langues, s’abaisserait à lire de la démographie ? Tant pis. Bonne année !