La lettre de l'ASDIFLE
  Numéro 4 - Janvier 2007

Colloque

Stéréotypage, stéréotypes : fonctionnement ordinaire et mises en scène Perspectives interdisciplinaires

21, 22 et 23 juin 2006 à l’Université de Montpellier,

Ce colloque, coordonné par Henri Boyer, s’est ouvert par un rappel de la tendance inéluctable des représentations partagées au stéréotypage, qu’elles soient qualifiées de collectives, sociales ou (socio)linguistiques. Cette introduction fut l’occasion pour Henri Boyer de réaffirmer que les stéréotypes sont les produits, plus ou moins abondants dans les imaginaires des communautés, du processus de figement représentationnel. Qu’ils soient nécessaires, pour certains, au bien-être communicatif des membres de ces mêmes communautés ou que pour d’autres il faille les dénoncer pour leur nocivité, ils représentent un objet d’analyse dont l’intérêt n’a cessé de se confirmer au sein des sciences de l’homme et de la société.

Le Stéréotype et les stéréotypes étaient abordés selon diverses perspectives théoriques et méthodologiques (cognition et croyances, catégorisation et discrimination …) et relevant de divers niveau de fonctionnement (la langue, le discours, la communication, les conduites, l’organisation de l’espace …).

Les communications nous invitaient à confronter les approches du stéréotypage et des stéréotypes produites dans divers champs disciplinaires : les sciences du langage (sociolinguistique, sémiotique et analyse de discours …), la psychologie sociale et la sociologie, l’analyse de la communication médiatique ou encore celle des discours cinématographiques, la didactologie des langues et cultures.

– Au cours de la première plénière, « Les stéréotypes, c’est bien. Les imaginaires, c’est mieux » Patrick Chardenet (Université de Paris XIII) abordait la question des stéréotypes en tant qu’analyste du discours. Dans le cadre de cette intervention, Patrick Chardenet rappelait que les points communs des stéréotypes sont de se référer à ce qui est dit de façon répétitive, aidant ainsi à la fixation. Ils dérivent une caractérisation simplificatrice et généraliste, circulent dans les groupes sociaux et sont donc supposés partagés, deviennent dans le fonctionnement langagier, un argument d’activité, ou rejet de cet argument, jouent un rôle de fonction identitaire, renvoient à une supposée réalité, quelque chose de faux et d’illusoire.

Patrick Chardenet proposait de se débarrasser de la notion de stéréotypes, ambiguë, investie de soupçons, présentant une prolifération de terme plus ou moins synonymiques dans l’usage courant tels que « cliché, lieu commun, préjugé, idée reçue, poncif … » difficiles à hiérarchiser, et de travailler sur la notion d’imaginaire.

– Dans la deuxième plénière : « Analyse diachronique et communicationnelle des représentations sociales et des stéréotypes : l’exemple de l’immigration en Suisse (1960-2005) », Uli Windisch (Université de Genève) a illustré la manière dont tout stéréotype est discuté dans l’espace public et la communication politique et se transforme, à travers l’exemple de l’évolution des stéréotypes sur l’immigration dans la société suisse.

– Dans le cadre de la troisième plénière intitulée « Stéréotypes, identités de genres et médias », Claude Chabrol (Université de Paris III) proposait dans une démarche psycho-socio-langagière d’ouvrir une réflexion sur les contenus conceptuels des stéréotypes souvent posés comme liés aux représentations sociales et parfois même aux idéologies.

Claude Chabrol prenait appui sur des analyses de la presse féminine française et de publicités mettant en scène hommes et femmes, pour apprécier dans des genres discursifs différents, les rapports entre ces mises en scène langagières et iconiques et les problématiques identitaires à propos des genres et rôles sexuels.

Les communications proposées étaient réparties selon cinq axes :

  • la question de la responsabilité des médias ;
  • la création artistique, elle aussi sollicitée par les médias ;
  • les stéréotypes dans son lien fondamental à la catégorisation intra ou intercommunautaire, la question de la construction des identités ;
  • le traitement du stéréotype à l’école et en éducation, particulièrement exposé à l’enseignement apprentissage des langues ;
  • les langues, dialectes, le fonctionnement dans les actes de communication.

Ce colloque fut l’occasion de mettre en évidence, au sein de diverses productions discursives, la prégnance aussi bien que la rentabilité des stéréotypes dans la communication sociale, et les enjeux de divers ordres dont ils sont investis.

Nécessaires dans le processus d’apprentissage, de construction de la sociabilité, ils ont une double fonction, psychologique et sociale de création de valeurs, de justification de l’auteur et de construction identitaire.