Journées 2008 de la
Coopération internationale et du Développement

DISCOURS DE CLÔTURE DU MINISTRE

Madame la Directrice,

Mesdames et Messieurs,

Chers Amis,

Il y a aujourd'hui un peu plus d'une semaine, dix de nos soldats sont tombés en Afghanistan. Dix jeunes gens ont été tués au cours d'une embuscade menée par les rebelles taliban. Vous avez tous suivi cet épisode douloureux, vous avez vu les visages de ces garçons dont les plus jeunes n'avaient pas vingt ans. J'ai vécu sur place le désarroi de leurs camarades. J'ai écouté la détresse des rescapés. J'ai partagé à Paris la douleur immense de leurs familles, mais j'ai vu aussi leur détermination. J'ai entendu des polémiques, ceux qui nous reprochent tout ce que nous faisons et ont voulu tirer de ce drame la condamnation d'une opération militaire qu'ils estiment vouée à l'échec. C'est, d'ailleurs, parce qu'il y avait cette session extraordinaire des deux commissions de la Défense et des Affaires étrangères à l'Assemblée nationale, que je n'ai pas pu vous rejoindre à la Mutualité pour vous apporter ce message.

Mais à vous, je peux le dire : oui, si notre présence en Afghanistan se limitait à des objectifs militaires, l'échec serait à peu près certain. Mais nos soldats ne sont pas seuls. La stratégie militaire n'est pas la seule. Nous avons la chance d'avoir en Afghanistan, comme partout dans le monde, une force intelligente qui propose aux populations civiles, aux femmes, aux hommes, aux enfants, un projet de développement partagé, une solidarité fondée sur l'esprit.

Cette force, c'est notre réseau de coopération et ses partenaires, c'est vous.

En Afghanistan, nous combattons le terrorisme, bien sûr, c'est notre honneur et notre devoir. Mais notre honneur, c'est aussi d'avoir ouvert le Centre culturel français de Kaboul en 2003 et d'y dispenser des cours à plus de 650 étudiants. Notre honneur, c'est de soutenir l'hôpital de la mère et de l'enfant à Kaboul avec l'Aga Khan et avec la Chaîne de l'Espoir. Notre honneur, c'est d'avoir aidé à la réouverture du lycée de garçons Esteqlal, du lycée de filles Malalaï et de favoriser l'apprentissage du français à près de 7.000 personnes.

Ces 7.000 personnes, toutes celles et ceux que nous aidons à accéder aux soins, à l'éducation, à la culture, sont l'avenir de l'Afghanistan. Vous pouvez être fiers d'œuvrer aux côtés de nos troupes, en complément de leur action, pour la paix et pour la démocratie.

Je vous demande très précisément de mettre au point de nouveaux projets de solidarité pour le peuple afghan, concrétisant le fort engagement de la France que nous avons manifesté à l'occasion du Sommet de Bucarest et de la Conférence de Paris.

Mesdames et Messieurs, mes chers amis, je parle aujourd'hui de l'Afghanistan car ce sujet occupe nos esprits, mais je pourrais multiplier les exemples qui attestent de votre rôle central dans la stratégie et l'action de ce ministère. Je pourrais parler de la santé et de l'action d'Unitaid, après bien d'autres initiatives qui ont fait le tour du monde. Je pourrais parler de la crise alimentaire mondiale et de votre travail de coordination et d'impulsion du groupe de travail interministériel ; de l'attractivité de notre système universitaire et de l'œuvre des espaces CampusFrance pour accueillir les étudiants étrangers ; de ce vecteur de promotion de la démocratie et des Droits de l'Homme qu'est la francophonie ; de la solidarité scientifique avec les pays du Sud pour le développement durable ; des états généraux de l'enseignement français à l'étranger qui se dérouleront à Paris le 26 septembre prochain.

Sur tous ces sujets, vous avez la chance de tenir entre vos mains le cœur de notre diplomatie, sa partie concrète, et, je le pense, sa partie la plus noble.

C'est pourquoi, Mesdames et Messieurs, notre rencontre d'aujourd'hui est pour moi très importante. Pour vous remercier de tout ce que vous entreprenez chaque jour, dans des conditions que je sais difficiles. Mais aussi pour vous encourager à prendre toute votre place, à faire valoir tous vos talents dans les grands chantiers diplomatiques qui sont les nôtres et pour lesquels, comme en Afghanistan, nous ne pourrons rien sans vous.

J'ai déjà eu l'occasion de vous dire le prix que j'accorde à votre liberté, à votre capacité d'initiative, à votre créativité. Je les crois plus que jamais nécessaires et j'en ai besoin.

J'en ai besoin par exemple pour l'Union pour la Méditerranée, ce grand défi que nous avons lancé à ceux qui nous annoncent un choc des civilisations.

Cette Union, vous la construisez déjà par les initiatives que vous avez prises, comme la Rencontre scientifique méditerranéenne qui s'est tenue à Paris dès le 26 juin et a formalisé un projet d'Espace méditerranéen de la science autour de propositions sur la sécurité alimentaire, l'environnement marin et le climat.

Vous l'avez préfiguré aussi à travers la richesse de nos centres et instituts tout autour de la Méditerranée : de l'Institut français d'études anatoliennes d'Istanbul à l'Institut français du Proche-Orient à Damas, Amman et Beyrouth, du Centre de recherche français de Jérusalem au Centre d'études et de documentations économiques, juridiques et social du Caire… sans oublier nos grandes missions archéologiques en Turquie, en Egypte ou ailleurs.

Par cette richesse unique, vous êtes les mieux à même de donner sens et de donner corps à cette Union nouvelle, qui ne pourra fonctionner qu'en s'appuyant sur des projets locaux, concrets, originaux, associant la société civile, les Universités, les entreprises.

L'Union pour la Méditerranée, mes chers amis, a besoin de vous et je prendrai connaissance avec intérêt des résultats de l'atelier que vous avez tenu ce matin. Là aussi, je vous demande d'être une force de proposition, pour traduire sur le terrain l'éclatant succès du Sommet de Paris pour la Méditerranée, le 13 juillet dernier.

Troisième et dernier exemple, je voudrais vous remercier de votre mobilisation autour de la Présidence française de l'Union européenne à travers notamment la saison culturelle européenne et vos actions en faveur du plurilinguisme en Europe. Ne laissons pas retomber cet élan après le 31 décembre, je vous en prie. Continuons à mobiliser notre réseau autour de projets européens, dans les pays de l'Union et ailleurs.


Mais, vous le savez bien, il ne sert à rien de réaffirmer des ambitions, de promettre des aventures, si l'on ne se donne pas les moyens de les mener à bien. Et la question des moyens de notre diplomatie est aujourd'hui posée.

Intervenant devant vous il y a un an, je vous avais dit ma volonté de faire de notre maison un ministère de la mondialisation. Un an après, les choses ont commencé à bouger. La réforme est en route. Chacun je pense a eu connaissance du double chantier que nous avons entamé, avec d'un côté le Livre blanc de la politique étrangère et européenne et d'autre part la Révision générale des politiques publiques - autrement dit la RGPP.

Je tiens à rendre hommage à la contribution considérable que votre directrice générale, Anne Gazeau-Secret, et ses équipes ont apporté à la réflexion.

Ces deux exercices, je le sais, suscitent l'inquiétude. Réduits à la brutalité des chiffres, ils se traduisent généralement par de tristes soustractions… les montants circulent de bouche à oreille, déconnectés de toute autre réalité, comme des promesses de lendemains qui forcément déchanteraient.

C'est pour vous un sujet d'inquiétude légitime et c'est pour notre maison un enjeu capital.

C'est pourquoi je voudrais profiter de ce que nous sommes réunis pour faire avec vous le point sur la réforme en cours. Car, je le crois, cette réforme est une chance pour notre ministère, pour notre réseau et pour vous-même.

C'est une chance pour notre ministère, qui se montre exemplaire dans ce grand chantier de réforme. La France a trop longtemps vécu à crédit, la France a trop facilement reporté sur ses enfants une gestion hasardeuse pour que nous ayons encore les moyens, aujourd'hui, de contester la nécessité d'économies qui vont au-delà d'ambitions comptables : il ne s'agit pas seulement de maîtriser les budgets de l'Etat ; il s'agit de réinventer notre fonctionnement, de rompre avec des inerties administratives confortables mais sclérosantes.

Vous le savez, la philosophie de la coopération a profondément changé. Il s'agit plus d'octroyer, mais de construire ensemble. Il ne s'agit plus d'imposer, mais de s'enrichir mutuellement dans des échanges de moins en moins inégaux. Il en va de l'efficacité de notre aide dans des pays de plus en plus jaloux de leur souveraineté.

L'évolution des sociétés implique aussi de concevoir nos politiques en acceptant le rôle accru des collectivités locales, des ONG, des universités, des entreprises, des syndicats. Bref de tous ceux qui sont déjà vos partenaires, nos partenaires.

Sans vouloir enrégimenter des structures dont la liberté fait la force, nous devons les fédérer, leur donner cohérence : notre rôle de coordination de l'action extérieure de la France, réaffirmé par le chef de l'Etat et le Premier ministre, nous impose d'étendre cette coordination aux nouveaux acteurs de la diplomatie.

C'est un métier dont vous avez été les inventeurs ces dernières années, par exemple en lançant des programmes de bourses pour les élèves ingénieurs des grands pays émergents cofinancés avec des entreprises françaises. Nous devons multiplier ces initiatives.

Mais, pour cela, la DGCID souffre d'une position qui n'est pas suffisamment centrale dans l'organisation du Quai d'Orsay. C'est pourquoi il est impératif de faire évoluer votre direction générale vers une véritable direction d'état-major.

Derrière ce vocable guerrier, j'entends la nécessité de retrouver une ambition et des moyens adaptés aux réalités de notre temps, en faisant de la direction générale le lieu de définition de nos politiques et de préparation des stratégies de la France dans le domaine du développement et de la coopération : si vous ne le faites pas, qui peut conduire la politique de la France dans le domaine de la coopération en santé, par exemple ? Bien sûr, il faut se faire aider, bien sûr il faut travailler avec d'autres ministères. Qui peut proposer les éléments d'une politique cohérente et ambitieuse d'attractivité de notre système universitaire ? Bien sûr aussi, avec d'autres ministères. Qui d'autre est capable de définir nos politiques d'échanges culturels, artistiques, cinématographiques ? Qui d'autre peut favoriser des partenariats scientifiques internationaux, au bénéfice de la recherche et du développement ?

Il s'agit donc de réaffirmer votre position dans le dispositif de coopération : vous êtes le point d'appui sur lequel nous poserons le levier  d'une politique réinventée.

Cette nouvelle organisation, que je présenterai après demain à l'ouverture de la Conférence des ambassadeurs, verra le jour dès l'an prochain. Et je m'y engage aujourd'hui : aucune des missions actuelles de la DGCID n'en sera absente, y compris le pilotage de l'audiovisuel extérieur dans le cadre de la réforme lancée il y a quelques mois.

L'évolution de la DGCID s'accompagnera d'un transfert plus systématique de la gestion et de l'instruction des projets à des opérateurs.

Cette division du travail doit permettre d'agir plus efficacement. Elle implique cependant d'exercer une vraie tutelle sur ces opérateurs, une tutelle que je veux stricte et efficace : nous en définirons très précisément, ensemble, les règles du jeu.

Le réseau d'opérateurs que nous devons mettre en place, vous en connaissez déjà les contours.

L'Agence Française de Développement verra sa gouvernance et donc ses statuts modifiés. Nous y avons beaucoup travaillé avec Alain Joyandet, qui était ce matin avec vous.

L'AEFE portera le plan de développement de l'enseignement français à l'étranger. Nous avons beaucoup de discussions à mener avec l'AEFE.

CulturesFrance, dont le statut d'association est aujourd'hui inadapté, doit se transformer en un établissement public industriel et commercial (dit EPIC) chargé des partenariats et des échanges culturels au sens large.

Enfin, un nouvel opérateur chargé de la mobilité internationale sera créé, lui aussi doté du statut d'EPIC. Il nous donnera la structure et la masse critique qui nous font aujourd'hui défaut pour gérer plus efficacement les programmes d'échanges, pour mener les actions de promotion à l'étranger de notre enseignement supérieur et pour mobiliser au mieux l'expertise française dans le monde, ce qui est un enjeu d'influence considérable.

Un dispositif interministériel, avec les ministères en charge de l'enseignement supérieur et de la recherche d'une part, de l'immigration et du développement solidaire d'autre part, sera mis en place pour piloter notre politique d'attractivité et de mobilité universitaire et scientifique.

Le même travail de refondation sera entrepris dans notre réseau à l'étranger, un réseau qui doit refléter les compétences transversales de la direction.

La révision générale des politiques publiques et le Livre Blanc ont réaffirmé la vocation de l'ambassadeur à coordonner l'ensemble des dispositifs de l'action extérieure de l'Etat, son autorité interministérielle. Nos ambassades, plus que jamais, doivent être, comme je l'ai souhaité, des "cabinets conseils" de la France en même temps que des maisons des Droits de l'Homme, car nous ne pouvons pas séparer valeurs et intérêts. Elles ont le devoir, troisième nécessité, d'accueillir l'expertise de tous nos ministères.

Dans les pays partenaires de l'aide publique au développement de la France, l'ambassadeur animera un "pôle développement" associant l'ensemble des acteurs publics concernés, parmi lesquels le représentant de l'Agence Française de Développement. La modification déjà mentionnée des statuts confortera les pouvoirs de coordination des ambassadeurs, y compris vis-à-vis des agences locales de l'AFD, et rassemblera l'ensemble des dispositions concernant ces pouvoirs.

Il sera procédé à un examen détaillé de la situation ambassade par ambassade. C'est à partir de cet examen que nous organiserons le dispositif en fonction des spécificités et des nécessités locales.

Partout où cela est possible, nos services de coopération et d'action culturelle en ambassade fusionneront avec nos centres et nos instituts culturels. Ces nouvelles entités permettront de regrouper nos forces et nos moyens et bénéficieront de l'autonomie financière, sous l'autorité de l'ambassadeur, pour nous permettre de monter des partenariats et d'augmenter nos moyens.

La carte de nos implantations culturelles doit évoluer avec le monde : le redéploiement de notre réseau au profit des pays émergents sera donc poursuivi.

Pour accroître la cohérence de ce nouveau dispositif, ces nouvelles plate-formes recevront un label unique. Chacun connaît les instituts Goethe, les British Councils et les instituts Cervantès : je vous propose, mais nous discuterons des noms, de donner à ces "Espaces France", à ces lieux de rayonnement et d'influence française le nom d'un grand esprit français, j'ai une petite faiblesse pour Albert Camus, d'autres ont proposé d'autres noms ou simplement le nom d'institut français.

Dès 2009, des expérimentations seront conduites dans treize pays pour tester la formule de regroupement des services de coopération et des centres culturels.

Les missions pour la science et la technologie seront maintenues dans les grands pays scientifiques.

Enfin, nous continuerons à développer notre relation étroite et féconde avec l'Alliance française, réorganisée récemment autour d'une Fondation.

Voilà, Mesdames et Messieurs, mes chers amis, les grandes lignes de la réforme que je souhaite mettre en œuvre avec vous. Une réforme à la mesure des efforts que vous déployez chaque jour. Une réforme qui nous permettra d'adapter réellement notre fonctionnement aux réalités du monde, du moins je l'espère mais le monde change beaucoup et très vite. Une réforme qui sera dans ses différents éléments mise en œuvre progressivement et qui devra être en place début 2010. A condition, bien sûr, d'avoir les moyens, financiers et humains, de la mener…

Je sais vos inquiétudes à ce sujet. Derrière ces structures, derrière ces schémas, derrière ces chiffres, il s'agit bien de femmes et d'hommes. Il s'agit bien de vous.

J'ai, donc, le devoir d'être franc : il y aura des diminutions d'emplois, comme dans l'ensemble du ministère et comme dans l'ensemble de l'administration française. Mais les réformes ne sont pas là pour permettre des économies. Les réformes sont là pour améliorer notre efficacité, adapter notre organisation, exprimer notre volonté. Je sais que ce type de discours suscite toujours le scepticisme. Soyez convaincu pourtant de ma sincérité et de ma détermination quand je tiens celui-ci devant vous.

Par ailleurs, ces diminutions d'effectifs seront compensées par des transferts vers les opérateurs.

Enfin, je veillerai à ce que ces réformes soient conduites en veillant avec le plus grand souci à la qualité du dialogue social, et à ce que personne ne soit laissé au bord du chemin. Suite à vos discussions hier matin, l'inquiétude des nombreux contractuels qui travaillent dans le réseau culturel a été portée à mon attention et j'ai demandé à mon directeur de cabinet de recevoir immédiatement Georges Diener, président de l'association des contractuels pour que leur situation soit prise en compte dans la conduite du changement.

Nous aurons d'ailleurs besoin de chacune des compétences que vous représentez. Je m'y engage : chaque situation individuelle sera regardée avec le souci de tenir compte de vos aspirations. Votre directrice générale a pris l'initiative de s'adjoindre les compétences de spécialiste de la gestion des ressources humaines, je la remercie.

Les moyens financiers du ministère des Affaires étrangères et européennes augmentent légèrement dans leur globalité, mais c'est vrai, le niveau de nos budgets bilatéraux est menacé par des subventions et des engagements multilatéraux qui font plus qu'absorber cette légère hausse. Pourtant je ne renoncerai jamais à défendre les crédits d'intervention des ambassades, qui, mieux que tous les investissements internationaux, donnent des résultats mesurables et une meilleure visibilité à notre action. Dans les choix et les arbitrages difficiles que nous avons à faire - nous ne pouvons plus "tout faire partout" -, je me battrai pour préserver un minimum de moyens pour notre coopération bilatérale, car je suis convaincu que c'est la condition indispensable de l'efficacité de nos politiques d'aide au développement et de rayonnement.


Mesdames et Messieurs, mes chers amis, je sais ce que vous apportez à notre politique étrangère. Ces journées, dont je prendrai connaissance avec intérêt des résultats, confirmeront les trésors d'imagination et d'enthousiasme dont vous faites preuve. Partout où je passe, on me dit votre travail, votre connaissance des autres, votre intelligence du monde. J'ai demandé à Olivier Poivre d'Arvor de me remettre avant la fin de l'année des propositions qui nous permettront, ensemble, de mieux valoriser votre action culturelle, de favoriser encore ce bouillonnement qui fait votre richesse.

Ce ministère nouveau, qui devra fonctionner avec des logiques parfois iconoclastes, sera le vôtre. Notre réforme, pour réussir, ne peut être celle d'un ministre, ni d'un gouvernement. Elle doit émaner d'une administration moderne, consciente plus qu'aucune autre des défis et des périls de notre monde, et décidée à y répondre avec audace et détermination.

Ce qui est en jeu, c'est notre efficacité, mais aussi notre liberté et notre modèle, un modèle dont les méthodes évoluent mais qui reste celui de la créativité et de la générosité intellectuelle. La diplomatie de la société civile que vous incarnez, qui fait remonter l'intelligence de la base vers le sommet, je veux la défendre. Je veux en faire le cœur de notre maison.

Si, en revanche, nos ambitions me paraissaient menacées, ou si les efforts qui nous sont demandés allaient au-delà de ce que j'estime juste, je serai à vos côtés pour défendre cette maison, comme j'ai défendu becs et ongles depuis plus d'un an ses missions et son périmètre de compétences, aussi son budget, même si le résultat n'a pas été exactement à la hauteur de ce que j'espérais.

Je sais que les ministres ne laissent pas grand-chose de leur passage et j'en connais beaucoup qui sont passés ici. Mais j'aimerais que dans quelques années, s'il reste quelque chose de mon passage ici, ce soit cette vraie réorganisation de votre travail. C'est une ambition élevée, trop élevée peut-être, mais je la forme devant vous pour nous tous, et pour vous d'abord.

Je la forme parce que j'ai confiance en notre capacité d'agir ensemble dans l'idée que nous nous faisons de la vocation de la France à être présente dans le monde.

Je vous remercie.


- Allocution de M. Alain Joyandet, secrétaire d’État à la Coopération et à la Francophonie lors de l’ouverture des Journées de la Coopération internationale et du développement (25 août 2008)

« À la demande du Président de la République, plusieurs grands chantiers ont été ouverts. Dans la lettre de mission qu’il a adressée à Bernard Kouchner, le Président Sarkozy nous a assignés collectivement un objectif particulièrement ambitieux, mais ô combien nécessaire : « donner une nouvelle impulsion à notre politique d’aide au développement ».

Dans le même esprit, le Président de la République nous a invités à accorder davantage d’importance au développement de notre influence culturelle à l’étranger.»

- Discours de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes (26 août 2008)

« En bref, nous devons continuer à peser et travailler pour obtenir une meilleure coordination et une meilleure utilisation des crédits : moins d’éparpillement, des procédures plus souples, plus de logique politique dans les choix. Pour avoir à une autre époque eu à traiter des programmes de recherche qui obéissent à des procédures proches de celle du développement, je sais que ce sont ces mêmes questions que doivent résoudre les commissaires en charge de ces dossiers.»

- Allocution de M. Xavier Darcos, ministre de l’Éducation nationale (26 août 2008)

« Les réformes significatives entreprises en 2007-2008 sont confirmées et amplifiées cette année. Elles traduisent le souci d’une meilleure prise en compte des attentes des familles, à qui le Président de la République a voulu donner de nouvelles libertés et reconnaître de nouveaux droits. Je pense notamment à la suppression progressive de la carte scolaire, qui a permis aux familles de choisir librement l’établissement scolaire de leurs enfants.»

- Allocution de M. Brice Hortefeux, ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire (26 août 2008)

« Respectueux de la noblesse et de l’efficacité des missions que vous menez à bien à travers le monde, je suis très heureux que nous puissions travailler ensemble. Nous devons contribuer à mettre en œuvre une politique toujours plus juste, toujours plus équilibrée, toujours plus utile.

L’aide au développement est un outil majeur de cette politique et nous en sommes, désormais ensemble, des acteurs aussi incontournables que déterminés.»


CONFÉRENCE DES AMBASSADEURS 2008

Mesdames et Messieurs,

Chers amis,

Je tiens d’abord à remercier Alain Juppé et Louis Schweitzer, et à travers eux l’ensemble des membres de la commission du Livre blanc, du remarquable travail qu’ils ont effectué.

*

A) Esprit de la réforme :

L’an dernier, je vous avais dit que je voulais faire de ce ministère le ministère de la mondialisation. Je veux aujourd’hui vous présenter la réforme que j’ai décidée, à partir du Livre Blanc, de la révision générale des politiques publiques et de quelques convictions avec lesquelles je suis arrivé ici, dont certaines que j’ai corrigées.

Il s’agit d’un projet de modernisation global, de longue haleine. Nous allons modifier les structures de l’administration centrale, réorganiser notre réseau diplomatique et consulaire, et réorienter les moyens de la diplomatie publique d’influence. Outre notre organisation, ce sont aussi nos méthodes de travail que nous allons faire évoluer.

La réduction du déficit budgétaire et des effectifs de l'État à laquelle notre ministère, comme tous les autres, doit participer n'est ni la raison d'être ni l'objectif unique de la réforme.

La modernisation de notre ministère doit revêtir, selon moi, trois dimensions prioritaires :

  • Remettre le Quai d’Orsay au cœur de l’action extérieure de l’État, ce qui passe, à Paris, par une responsabilité réaffirmée de notre ministère dans la mise en cohérence de l’action internationale de l’État, et sur le terrain, par le renforcement des pouvoirs de l’ambassadeur.

  • Permettre ainsi à notre ministère de répondre aux enjeux mondiaux auxquels doit faire face notre pays, ce qui suppose de muscler notre expertise sur ces dossiers.

  • Mettre aussi notre ministère au centre du réseau des partenariats (avec les ONG, les universités et centres de recherches, les entreprises,…) sur lequel repose dorénavant toute action extérieure crédible.

  • Réussir ce changement suppose que chacun y participe, dans un esprit de responsabilité, de solidarité et de travail en équipe.

    Voilà l’esprit dans lequel nous avons conçu la réforme.

    *

    B ) Voici maintenant son contenu :

    1) A l’administration centrale, un nouvel organigramme verra le jour courant 2009, dès que les textes réglementaires auront été élaborés.

    Il identifiera trois grandes fonctions : l’action politique, le traitement des enjeux mondiaux et le management.

    1-a) Première décision, la création d’une direction générale en charge de la mondialisation et des partenariats : son appellation définitive pourra être différente.

    Les enjeux mondiaux dont nous parlons ici, qu’il s’agisse du développement, de l’environnement, de la santé, de l’économie du savoir, de la régulation financière, sont aujourd’hui traités d’une manière dispersée, vous le savez, entre plusieurs directions du ministère. Certains sujets, je pense en particulier à l’énergie, à la démographie, aux migrations, aux religions, sont, faute de moyens, quasiment absents de notre dispositif, alors même que de nouvelles administrations se constituent en France dans ces domaines pour mettre en œuvre de nouvelles politiques publiques. Et pourtant, ces mêmes enjeux sont désormais au cœur de la compétition mondiale et notre action diplomatique, sauf à perdre toute efficacité, doit pleinement les intégrer.

    1/ Comment en effet appréhender la crise géorgienne sans avoir une vision précise des enjeux énergétiques ?

    2/ Comment construire un partenariat stratégique avec la Chine sans prendre pleinement en compte la lutte contre le changement climatique ou contre les grandes pandémies ?

    3/ Comment proposer une vision française de la mondialisation sans formuler une stratégie en faveur de la diversité culturelle, linguistique et religieuse ?

    C’est la raison pour laquelle j’ai considéré que la création d’une direction générale de la mondialisation et des partenariats était nécessaire. Elle sera organisée à partir de quatre pôles :

  • la politique d’attractivité, pour mobiliser nos atouts dans la mondialisation, qu’il s’agisse de nos technologies de pointe, de nos capacités de recherche, de notre enseignement supérieur et de notre expertise technique que nous devons mieux projeter à l’international comme l’a si justement analysé le rapport de Nicolas Tenzer. La structure en charge de cette politique aura la tutelle du futur opérateur, qui fusionnera EGIDE, CampusFrance et FCI . Elle agira en appui de nos entreprises et sera aussi le correspondant d’UbiFrance.

  • la diversité culturelle et linguistique, ce pôle aura la charge de l’enseignement du français et de l’action culturelle au sens le plus large. Elle pilotera l’opérateur ou les opérateurs qui se développeront à partir de CulturesFrance ainsi que l'AEFE, et reprendra aussi les compétences de l’actuelle direction de l’audiovisuel extérieur.

  • Les biens publics mondiaux (environnement, énergie et ressources naturelles, santé, éducation) seront traités en tant que tels dans une direction ad hoc, renforçant la contribution de la France à la réalisation des objectifs du millénaire et à la gestion des conditions de développement et des contraintes de la planète. Il s’agira d’assurer la définition des politiques publiques, la négociation et le pilotage de la coopération dans ces domaines. La lutte contre le changement climatique sera évidemment un domaine-clé.

  • enfin, l’économie globale et les stratégies de développement, pour analyser les transformations profondes de l’économie mondiale, pour contribuer à une gouvernance efficace du système multilatéral, à l’établissement de règles du jeu communes. La politique d’aide au développement est l’un des principaux éléments de notre apport à la mondialisation.

  • Notre ministère doit retrouver toute la capacité stratégique en la matière et améliorer la tutelle de l’Agence française de développement. Une cellule dédiée à ces fonctions de pilotage et de tutelle sera constituée auprès du Directeur général.

    D’autres entités au niveau du Directeur général traiteront de la coopération décentralisée d’une part, des ONG d’autre part, avec lesquelles notre partenariat sera profondément refondé. Un conseil stratégique de la coopération non gouvernementale que je présiderai fournira le lieu d’échanges entre le Quai d’Orsay et les partenaires du mouvement associatif.

    Ce schéma ne constitue pas l’absorption d’une direction par une autre, mais résulte de la fusion de différents services du ministère, en premier lieu de la DGCID et de la direction des affaires économiques, pour croiser les compétences et les talents. Elle devra s’ouvrir de la façon la plus large possible à des compétences nouvelles : non seulement fonctionnaires d’autres administrations mais aussi experts de l’extérieur.

    J’ai demandé au Secrétaire général de me proposer l’organigramme définitif, qui sera présenté au prochain Comité technique paritaire, et les méthodes de travail correspondantes.

    1- b) Deuxième décision, la création d’une direction de la prospective:

    Cette direction, rattachée au ministre, prendra la succession du centre d’analyse et de prévision. Elle doit être un lieu d’échanges d’idées et de réflexion, associant de façon aussi large que possible, en respectant leur liberté, les meilleurs représentants de l’université, des think tanks et de la société civile ; elle travaillera aussi sur des sujets fondamentaux et actuellement insuffisamment pris en compte, comme les questions religieuses (une équipe renforcée chargée des Affaires religieuses sera incluse dans la nouvelle direction) ou la démographie. Comment en effet définir une politique en Birmanie, au Proche-Orient ou encore en Afghanistan ou analyser la campagne électorale américaine sans une connaissance suffisante des phénomènes et mouvements religieux et de leur interaction avec la politique ? Le Directeur de la prospective sera en outre le correspondant des services français dédiés au renseignement, pour ce qui concerne leurs activités d’analyse ; cette mission doit en effet être pleinement prise en compte par le Département au moment où le livre blanc sur la défense et la sécurité insiste sur l’importance de la fonction d’anticipation.

    La nouvelle direction s’appuiera aussi davantage sur le réseau largement méconnu, et en tout cas insuffisamment exploité par le ministère, des centres de recherche en sciences humaines dont nous disposons dans de nombreuses régions.

    Je pense également à la publication de « cahiers du Quai d’Orsay » dans lesquels les Ambassadeurs et leurs équipes pourraient publier pour le bien de tous.

    1- c) - Troisième décision, le renforcement du pôle politique :

    La valeur ajoutée de ce ministère, c’est à la fois l’analyse, la connaissance et l’expérience du terrain et la maîtrise de la négociation internationale. Ces deux éléments sont complémentaires et appartiennent au même domaine politique. Les affaires politiques, sous l’autorité du Secrétaire général, forment un tout. C’est la raison pour laquelle j’ai pris les trois décisions suivantes :

  • les directions géographiques doivent réellement être à même de définir dans leur zone une politique cohérente correspondant à nos intérêts. A cette fin, elles doivent avoir une vision d’ensemble des politiques et des actions menées par tous les opérateurs publics français et aussi par nos partenaires bilatéraux et multilatéraux. Elles doivent être en mesure de connaître avec précision.

  • Les moyens notamment financiers mis en œuvre, notamment sur le plan financier, par le Quai d’Orsay mais aussi par les autres ministères. Le secrétaire général a lancé, dans ce domaine, un travail novateur : chaque direction a désormais une vision globale de l’allocation des moyens dans sa région. Ce travail facilitera les arbitrages sur la répartition géographie des moyens.

  • compte tenu de l’imbrication croissante de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et de l’action extérieure de l’Union Européenne, le directeur politique s’appuiera sur une direction de l’Union européenne intégrant le service de la PESC.

  • Le directeur politique assurera donc la synthèse entre le bilatéral et le multilatéral.

    1- d) Quatrième décision, la création du centre de crises :

    La gestion de crise est désormais un élément majeur de notre politique internationale, nous le savons d’expérience. J’ai donc décidé de créer un outil performant animé par une équipe permanente d’une cinquantaine d’agents, intégrant tous les aspects d’une crise, l’humanitaire et la protection de nos ressortissants. Cette équipe travaillera avec l’ensemble des administrations de l’État concernées. J’ai tenu à ce que ce nouveau centre soit opérationnel dès le 1er juillet pour le début de la PFUE. Les récents événements de Géorgie ont prouvé la pertinence de ce choix. Je vous incite à aller visiter les nouvelles installations. Je demande que cette culture de l’urgence soit partagée par chacun d’entre vous. Car vous en êtes les informateurs et les agents privilégiés. En particulier les attachés humanitaires à qui je demande aussi de s’occuper de l’adoption internationale et pour cela de prendre contact avec Rama Yade.

    1-e) Cinquième décision, la mise en place d’un conseil de direction du ministère :

    Autour du secrétaire général, qui en mon nom, dirige l’ensemble des services du ministère, il rassemble le directeur de cabinet, le secrétaire général adjoint, l’inspecteur général, les trois directeurs généraux, le directeur de la DCI et le directeur de la prospective. Agissant comme le « board » du ministère, ce conseil aura un rôle central de pilotage de l’action politique et dans l’organisation et la réforme du ministère.

    2) Réorganisation du réseau diplomatique.

    Le Président de la République et le Premier ministre ont décidé le maintien d’une présence diplomatique universelle : c’est un acquis fondamental.

    S’agissant de la carte de nos implantations, notre réseau sera réorganisé sur la base de trois catégories d'ambassades, selon les missions qu’elles sont appelées à remplir : une trentaine d’ambassades à compétences élargies, une centaine d’ambassades à missions prioritaires, une trentaine d’ambassades de présence diplomatique.

    Un travail a été lancé sous l’égide du Secrétaire général vous demandant d’identifier les missions stratégiques qui doivent continuer à être assurées dans vos pays de résidence. Ce dialogue que vous conduisez avec les directions géographiques conduira à retenir d’ici la fin de l’année les missions qui vous seront fixées et les moyens qui vous seront alloués en conséquence :

  • les ambassades à compétences élargies couvriront toute la gamme des fonctions de l'État à l'étranger (politique, consulaire, économie, sécurité, coopération et/ou action culturelle). Elles devront sensiblement modifier leurs modes de fonctionnement par la création de pôles de compétences interministériels. Certains effectifs seront réduits sur les trois prochaines années, afin de contribuer au renforcement de l’administration centrale et de nos postes dans les pays émergents ou les pays en crise.

  • Une centaine d'ambassades à missions prioritaires concentreront leurs activités sur un certain nombre d'objectifs bien définis selon les pays et leurs divers contextes, en adaptant leurs effectifs en conséquence.

  • Une trentaine d’ambassades de présence diplomatique privilégieront une diplomatie d’influence par la constitution d’un réseau de contact. Ils assureront en outre une voire deux missions (économique, consulaire, politique...). La direction de ces ambassades impliquera un investissement personnel et professionnel accru. Je souhaite qu’elles soient confiées en priorité à des agents choisis pour le dynamisme, leur polyvalence et leur maîtrise des nouvelles technologies d’information et de communication, et en particulier à de jeunes conseillers des affaires étrangères. J’ai demandé à cet effet une modification du décret de 1969.

  • Cette répartition des postes est par nature appelée à être modifiée en fonction de nos intérêts et des enjeux propres à chaque pays.

    J’ai obtenu que votre autorité sur l’ensemble des services de l’État et de ses opérateurs sur le terrain soit renforcée. Le décret de 1979 sur les pouvoirs des ambassadeurs est plus que jamais le fondement de vos responsabilités élargies. Mais l’autorité n’est pas seulement une affaire de décret. C’est désormais à vous de démontrer votre capacité à être le vrai patron des services de l’État à l’étranger. Et nous devrons bien vite aborder les problèmes de formation.

    3) Modernisation du réseau consulaire :

    Notre réseau consulaire, lui aussi, doit être modulé, notamment en dehors des capitales, en fonction des besoins de nos compatriotes et de leurs familles et du rayonnement de notre pays :

  • il y a des endroits où une activité strictement consulaire ne se justifie plus mais où le renforcement de notre présence économique, culturelle et politique est indispensable. Je pense d’abord aux pays de l’Union européenne, dans lesquels les progrès de la citoyenneté européenne modifient en profondeur les activités consulaires proprement dites et où la montée des pouvoirs locaux rend nécessaire une présence dans les régions. Je demande au secrétaire général, en liaison avec le directeur des Français de l’étranger, du directeur de la coopération européenne et de nos ambassadeurs en Europe, de me présenter les éléments d’un plan de transformation de notre réseau consulaire européen. Avec certains pays comme l’Espagne et l’Italie nous sommes déjà d’accord.

  • dans d’autres pays au contraire, le développement de nos entreprises et l’accroissement de notre communauté impliquent la création ou le renforcement de nos consulats. Je pense naturellement aux pays émergents, à l’Inde, à la Chine et à la Russie notamment, où notre présence consulaire est en plein essor.

  • 4) Diplomatie d’influence et développement :

    4-a) Le Livre blanc et la RGPP ont réaffirmé que la diplomatie publique d’influence – c’est-à-dire la capacité pour un pays de promouvoir sa culture, sa langue, ses conceptions sociales et ses idées, constitue un élément central de notre politique étrangère.

    A l’heure où nos principaux partenaires augmentent les moyens consacrés à cette forme de diplomatie, il est indispensable de renforcer l’efficacité de la nôtre, tout en préservant ses atouts : la connaissance du terrain, les partenariats noués de longue date, l’adaptation à la demande locale, la capacité à susciter des financements extérieurs.

    J’ai donc proposé de fusionner partout où cela est possible nos services de coopération et d’action culturelle en ambassade avec nos centres et instituts culturels. Ces nouvelles entités, qui permettront de regrouper nos forces et nos moyens, bénéficieront de l’autonomie financière. Elles seront placées sous votre autorité. Des missions pour la science et la technologie seront maintenues dans les grands pays scientifiques. La carte de nos implantations culturelles continuera à évoluer en fonction de l’évolution du monde. Nous poursuivrons bien sûr notre partenariat privilégié avec l’Alliance Française.

    Les nouvelles plateformes, ces « Espaces France », recevront un label unique. Chacun connaît les instituts Goethe, les British councils, les instituts Cervantes. Il est temps qu’un identifiant unique caractérise ces lieux de rayonnement et d’influence française à l’étranger. J’ai présenté avant-hier aux journées de la DGCID quelques idées, par exemple le nom d’une grande personnalité de la culture française incarnant les valeurs qui nous sont chères ; j’ai proposé Albert Camus. J’aime son combat pour la liberté de l’homme ; j’aime lorsque, dans « les Justes », il proclame « qu’il ne suffit pas de dénoncer l’injustice mais qu’il faut donner sa vie pour la combattre ». N’est-ce pas là finalement la vocation ultime de notre diplomatie ?

    4-b) S’agissant du développement, il est désormais essentiel, je l’ai déjà dit tout à l’heure que notre ministère assume le rôle principal dans la définition des politiques ; y compris sous l’angle de la communication publique. Avec Alain Joyandet, je me suis battu pour que nous obtenions de nouveaux leviers pour exercer ce rôle : et notamment pour exercer une véritable tutelle politique de l’Agence française de développement.

  • A Paris, outre la création de la nouvelle direction générale, la gouvernance de l’AFD sera revue et ses statuts modifiés en conséquence. Le Conseil d’État a certes émis des objections à ce que le ministre chargé de la coopération puisse exercer la présidence du Conseil d’administration de l’Agence. Nous travaillons donc actuellement à une formule équivalente.

  • Sur le terrain, la modification des statuts de l’AFD permettra de les adapter au décret de 1979. Il sera créé, dans les ambassades, un pôle développement sous l’autorité de l’ambassadeur, auquel participera le représentant local de l’AFD, ainsi naturellement que le Conseiller de Coopération et d'Action Culturelle (COCAC).

  • *

    II) Ce que la réforme signifie pour chacun d’entre vous

    Nouvel organigramme de l’administration centrale, réforme des réseaux diplomatique, consulaire et de la diplomatie d’influence : l’ensemble de nos structures connaîtront, dans les années à venir, des évolutions importantes. Cependant, ces réformes n’auront de sens que si elles s’accompagnent d’un changement profond dans notre culture collective et nos modes de fonctionnement. La réforme ne réussira que si ceux qui font la force de ce ministère par leur talent et leur mobilisation voient leurs conditions de travail et de vie changer concrètement.

    Les agents sont attachés à ce ministère. Ils travaillent beaucoup, ils rentrent tard ; ils sont mobilisés, notamment les jeunes, jour et nuit par les crises, pour assurer cette fonction de réaction qui est aussi le quotidien du métier de diplomate. Et pourtant, ils exercent leur métier dans des conditions difficiles.

    Améliorer les conditions de travail au quotidien :

    Il ne s’agit pas de se payer de mots, mais de prendre des mesures, qui changent concrètement le quotidien des agents. J’ai donc demandé au secrétaire général qui en a fait sa ligne directrice et a beaucoup consulté ces derniers mois de mettre en œuvre des mesures concrètes, sur les déplacements des agents et sur les moyens de communication.

    Dans quelques mois, un nouveau cadre de travail sera en place, avec les emménagements dans nos nouveaux immeubles de la Convention et de La Courneuve. J’ai veillé personnellement à la qualité des aménagements intérieurs. En 2009, seront lancées les études puis les travaux de rénovation du Quai d’Orsay.

    B) Promouvoir l’égalité hommes - femmes

    Après avoir évoqué la situation de nos agents les plus jeunes, je voudrais aussi parler de celle des femmes de ce ministère. J’ai toujours été, dans toutes les responsabilités que j’ai exercées, attentif à cet objectif de justice qui est en même temps un impératif d’égalité. Nous devons continuer à tout faire pour favoriser la promotion des femmes, aujourd’hui encore sous-représentées dans les plus hautes fonctions de ce ministère.

    D’ores et déjà, les réunions que j’ai menées autour de la journée internationale des femmes, le 8 mars dernier, m’ont permis de prendre des décisions que je veux vous rappeler :

    1. Nous devons nous atteler à un objectif de parité des promotions.

    2. Je souhaite que l’on cesse de convoquer des réunions après 17h, qui se font systématiquement au détriment de ceux (en pratique celles) qui assument des responsabilités familiales

    3. Nous devons enfin poursuivre le développement des places en crèches comme nous le faisons autour du nouveau site de la Convention

    C) Prendre en compte le mérite dans les rémunérations et le déroulement des carrières :

    Changer de culture collective, c’est aussi mieux récompenser ceux qui occupent les fonctions les plus exposées, ceux qui font preuve d’imagination et d’audace. Je veux que le critère du mérite soit pleinement pris en compte dans les nominations et dans les rémunérations. C’est pour cette raison que j’ai demandé que le décret de 1969 soit modifié pour supprimer l’obligation d’être conseiller des affaires étrangères hors classe pour être nommé ambassadeur.

    En matière de rémunérations, je veux que les régimes évoluent, à l’administration centrale comme dans les postes, pour augmenter la part liée au mérite et à la difficulté réelle des fonctions :

  • à l’administration centrale, l’effort d’augmentation des primes, engagé depuis plusieurs années, sera poursuivi cette année et dans les prochaines années grâce à la récupération des économies dégagées par nos réductions d’effectifs. Je souhaite que le ministère joue un rôle pilote dans la mise en place de la nouvelle prime de fonctions et de résultats créé par la fonction publique, qui permettra d’accroître la part variable de la rémunération.

  • s’agissant des rémunérations à l’étranger, je me suis battu pour que les indemnités de résidence ne soient ni fiscalisées, ni ponctionnées pour financer la hausse des rémunérations en administration centrale. En contrepartie, nous avons la responsabilité de faire évoluer ce régime, notamment pour mieux refléter la réalité des fonctions exercées.

  • J’ai décidé de commencer par la grille 1, c’est-à-dire par la vôtre, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, les différences entre les pays résultant plus de stratifications historiques que d’une évaluation objective de vos fonctions. À partir du 1er novembre, certains ambassadeurs particulièrement exposés, comme ceux en poste à Kaboul, Islamabad, Alger, Beyrouth ou à Bagdad, ainsi que des ambassadeurs dont les fonctions sont particulièrement lourdes verront leur indemnité augmenter sensiblement, tandis que d’autres seront revues à la baisse. Dans les mois à venir, les grilles des autres catégories de personnels seront simplifiées et définies sur la base des fonctions réellement exercées.

    D) Changer nos méthodes de travail :

    Il faut moderniser nos méthodes de travail, pour que le ministère en finisse et le poids des habitudes. Nous devons passer à une culture du résultat.

    D’abord, chacun doit se sentir responsable : les directeurs, qui doivent être en mesure de mettre en œuvre les orientations fixées sans avoir à en référer, les ambassadeurs, notamment dans leurs contacts avec la presse ou dans les préparations des dossiers de visite, mais aussi les sous-directeurs et les rédacteurs, dont l’esprit d’initiative est un bien pour cette maison.

    J’attends des ambassadeurs et des directeurs qu’ils forment les jeunes agents, fassent preuve de la pédagogie nécessaire, récompensent les mérites et sanctionnent les insuffisances, qu’elles soient de gestion ou de comportement.

    J’attends de la DGA, et de son nouveau directeur général, qu’elle accompagne cet effort, dans un esprit de partenariat, en contribuant à la levée des multiples contraintes et lourdeurs que, trop souvent, nous nous imposons à nous-mêmes. Je lui demande de passer d’une culture de la prescription à une culture de la prestation de service.

    Enfin, il faut que ceux qui travaillent beaucoup, notamment les jeunes, soient assurés que leur travail est utile, ce qui suppose d’alléger et de simplifier. Les tâches bureaucratiques s’accroissent en effet au détriment de votre cœur de métier : réfléchir, analyser, proposer. Il faut sans délai prendre des mesures simples permettant concrètement d’y remédier : publier des argumentaires sur diplonet, limiter les commandes de note, cibler la correspondance télégraphique à ce qui est indispensable à l’information des autorités, mettre en place une messagerie sécurisée pour fluidifier les échanges, déléguer aux postes la préparation des dossiers de visite….

    En permettant à chacun de se sentir responsable, nous démultiplierons la capacité de travail et d’initiative de ce ministère.

    Car ces réformes immenses ne sont pas celles d’un ministre, ni d’un gouvernement. Ce sont celles d’une administration moderne, consciente des défis de notre monde et décidée à y répondre.

    Ce dossier de la réforme est pour moi central. Je m’y impliquerai aux côtés de chacun d’entre vous. Je sais que les ministres ne laissent pas grand-chose de leur passage. Mais j’aimerais que dans quelques années, s’il reste quelque chose de mon passage ici, ce soit cette vraie réorganisation de notre travail.

    C’est une ambition élevée, trop élevée peut-être, mais je la forme pour nous tous, et d’abord pour vous.

    Je vous remercie./.